viernes, 24 de octubre de 2008

« Il ne peut y avoir de véritable nationalisation que si, nous, les travailleurs, assumons la tâche de diriger l’entreprise »


Interview de Jesús Pino, membre du « Frente Revolucionario de Trabajadores Siderúrgicos de SIDOR » (« Front révolutionnaire de travailleurs sidérurgiques de SIDOR »). Jesus est un des nos invités spéciaux de la journée de solidarité du 15 novembre à Bruxelles.

Peu après la nationalisation de l’entreprise emblématique de la sidérurgie vénézuélienne « Siderúrgica del Orinoco » (SIDOR), un groupe de travailleurs a initié la formation d’un front révolutionnaire au sein de l’entreprise.

Pourrais-tu expliquer à nos lecteurs ce qu’est le Front révolutionnaire de travailleurs sidérurgiques de SIDOR ?

Jesús Pino : Le Front est né après la nationalisation de SIDOR, à partir du message du commandant Chavez affirmant que SIDOR doit devenir une entreprise efficace et socialiste.
Les travailleurs ont toujours été exploités par Termium, la multinationale qui possédait SIDOR à l’époque. Quelques travailleurs, principalement ceux de la « nómina de conducción » (personnel défini comme de confiance non inclus dans les conventions collectives, NdT), ont formé le « Front révolutionnaire de travailleurs sidérurgiques » qui a pour but, outre celui de contribuer à cette mission demandée par le président, de participer à l’organisation des travailleurs et à leur prise de contrôle de l’entreprise. Nous estimons qu’ il ne peut y avoir de véritable nationalisation que si, nous, les travailleurs, assumons notre rôle de diriger l'entreprise.

Pourrais-tu nous expliquer la trajectoire de SIDOR, les conséquences de la privatisation en 1997 et la lutte des travailleurs pour la nationalisation ?

Jesús Pino : Cela fait 30 ans que je travaille à SIDOR et je peux faire un petit bilan de son évolution d’un point de vue marxiste. SIDOR était une société d’Etat, elle a été privatisée en 1997 du fait de la prédominance de la pensée néolibérale. Un des artisans de cette privatisation, Teodoro Petkoff (le ministre du Travail de l’époque et un des leaders actuels de l’opposition) disait qu’il valait mieux vendre la société que la garder.

Au sein même de l’entreprise, nous fîmes la constatation que ceux qui détenaient le pouvoir – Andrés Velázquez (le gouverneur de l’époque) et les syndicats, contrôlés à l’époque par la Causa R (parti politique vénézuélien issu de la division de l’ancien Parti communiste) ont appuyé cette politique néolibérale et ont démobilisé les travailleurs.

Le processus de privatisation a entrainé des licenciements massifs et la perte de droits pour les travailleurs. L’Etat a cessé de percevoir de l’argent que la multinationale a gardé légalement ou illégalement pour elle. A l’heure actuelle, nous ne savons pas encore quels ont été les dégâts occasionnés par la multinationale à l’environnement, au patrimoine des travailleurs et à celui de l’Etat.

Durant dix ans, chaque fois qu’il y avait une négociation de la convention collective, il y avait un conflit car la multinationale voulait exploiter le plus possible les travailleurs. Au final, SIDOR est restée paralysée durant 21 jours. C’est le président Chavez lui-même qui a dû intervenir pour trouver une solution au conflit ; ce qui a donné lieu à la nationalisation.

Et maintenant, qu’est-ce qui va se passer ? Il est question d’organiser les travailleurs. Nous travaillons dans le « Consejo de Fábrica » (conseil d’entreprise), en espérant recevoir l’aide du gouvernement pour que le processus de pouvoir ouvrier puisse exister pleinement et que les travailleurs prennent le contrôle.

Compte tenu du débat antérieur sur la cogestion et des dernières déclarations de Chávez sur le rôle d’avant-garde de la classe ouvrière, quel est le rôle, selon vous, que la classe ouvrière doit jouer dans l’entreprise socialiste ?

Jesús Pino : Nous ne voyons pas le travailleur du même point de vue que celui du capitalisme, mais comme un être pensant, capable de prendre des décisions et, en plus, avec des intérêts de classe. C’est pourquoi il est nécessaire que les travailleurs de SIDOR assument cette tâche.
Nous devons maintenant œuvrer avec les travailleurs et le syndicat vers un changement de culture. Le socialisme ne peut pas exister si le travailleur pense que tout va bien ainsi, alors que des milliers de personnes vivent dans la misère.

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